Le sillon ou pli interfessier, nommé aussi rainure interfessière ou raie des fesses, qualifie la fente qui sépare les deux fesses en deux demi-lunes qui suivent la courbure du sacrum et du coccyx. Cette description anatomique précisée, il s’agit de voir comment le vestiaire masculin a été constitué pour habiller ce sillon interfessier. Slip, slip kangourou, caleçon, boxer, shorty, string, l’homme bénéficie d’une large gamme de modèles dont la longueur et l’ajustement sont très variables. Il reste un modèle nommé « jockstrap » qui se démarque de ces sous-vêtements par l’ample faille qu’il laisse libre de tout tissu, justement au niveau des fesses. Le jockstrap que l’on appelle également jock ou « suspensoir » est un sous-vêtement pour homme comprenant une poche pour maintenir correctement les organes génitaux, d’une large ceinture et de 2 élastiques latéraux qui laissent les fesses entièrement à découvert. Si, aujourd’hui, c’est sa fonction de sex-appeal qui s’est ancrée dans l’imaginaire collectif, son origine et son utilité sont à chercher dans un autre domaine. Revenons sur l’histoire de la mode de ce jockstrap qui laisse libre de tout tissu les deux fesses et la faille qui les sépare.

« Jockstrap » ou « suspensoir » (face, côté, arrière)
Les historiens font remonter l’apparition du jockstrap à 1874 et les premières expérimentations d’un jeune homme du nom de Charles F. Bennett, 18 ans, receveur de balle au baseball pour les Red Barons de Savannha en Georgie. Il aurait raté la réception d’un lancer qui lui serait arrivé directement dans les parties génitales. La glace appliquée par son coach ne changeant rien à la douleur endurée, cette expérience lui aurait donné l’envie et l’idée de créer une protection pour les organes génitaux et le scrotum, sans pour autant contraindre l’arrière du bassin, les fesses, afin de conserver à la fois un mouvement de flexibilité pour la position accroupie de receveur et une souplesse d’action pour la course qui s’ensuit ; cette large fente à l’arrière du sous-vêtement était encore plus importante pour le bien-être corporel puisqu’elle permettait d’éviter tout frottement avec la matière épaisse et rêche du sous-vêtement, laissant un contact direct avec la matière beaucoup plus fine et délicate du pantalon et permettant au pores de la peau de mieux respirer, donc de minimiser toute irritation cutanée.

Modèle associant le Jockstrap au suspensoir inventé par Charles F. Bennett, déposé le 29 mars 1897 et breveté le 30 novembre 1897 par the United States Patent and Trademark Office.
Mais, comme toujours en histoire de la mode, tout n’est pas si simple ! Cette fente vestimentaire qui laisse apparaître le pli interfessier tout en couvrant le scrotum, à savoir les testicules et le pénis, est bien plus ancienne. Elle apparaît au 15ème siècle, au moment où l’homme abandonne la tunique portée depuis près de 3000 ans et choisit d’adopter un pourpoint court cintré à la taille auquel sont attachées deux chausses, sortes de longues chaussettes, qui couvrent chacune des jambes mais qui ne sont pas cousues au niveau du bassin et, en particulier, de l’entrejambe. Cela est parfaitement perceptible sur plusieurs images.



Le détail de la fresque de Piero della Francesca est un exemple de cette silhouette impudique qui, au regard du résultat, mérite incontestablement d’être qualifiée d’exhibitionniste. Cela explique le sermon prononcé en 1429 par San Bernardino de Sienne – pionnier dans la censure morale en matière d’habillement – dans lequel il réprimande les parents qui habillent leurs jeunes garçons de cette nouvelle silhouette qui montre beaucoup de chair aux sodomites1 . Mais la résonance de ce sermon est restée timide puisqu’il s’avère nécessaire de proclamer des ordonnances, notamment à Nuremberg et à Strasbourg en 1480, qui préconisent de faire en sorte que « les parties privées ne soient plus visibles ni par devant ni par derrière »2. La bipartition des chausses laissant l’entrejambe simplement couvert par les plis amalgamés de la longue chemise portée en dessous, il restait à trouver un dispositif de fermeture réunissant les deux chausses. C’est à la fin du 15ème siècle que le haut-de-chausses se généralise en tant que vêtement unitaire, avec un rabat triangulaire réunissant les chausses au niveau du plancher pelvien et maintenu au niveau du pubis.

Jockstrap, publicité pour la société Bike de Charles F. Bennett, 1941.
Cette ouverture sur les fesses réapparaît à la fin du 19ème siècle, à une époque charnière pour l’essor de nombreux sports à risque dont la pratique intensive pouvait provoquer des séquelles douloureuses sur les organes génitaux masculins. En réalité, Charles F. Bennett possédait une marque de vêtements et d’équipements de sports baptisés « Bike » qui, comme le nom l’indique, était surtout destinée aux cyclistes. Effectivement, à partir des années 1890, les premiers utilisateurs d’un suspensoir avec un tissu rembourré au niveau des organes génitaux et du scrotum sont les « bike jockeys », à savoir les livreurs et les messagers dont l’activité se faisait principalement à vélo.
Le premier modèle de suspensoir se trouvait être strictement un tissu avec une ceinture et deux bandes élastiques latérales. Bennett essaya divers types de matériaux mais ils s’avéraient toujours trop épais, trop lourds, donc inconfortables pour les sportifs. La légende raconte qu’un jour il vit sa mère faire cuire des œufs à la coque avec un petit appareil en plastique. Elle mettait les œufs dans de petites coquilles en plastique pour les faire bouillir. L’idée était née ! Il lui fallut de nombreux essais infructueux pour établir un prototype ; il essaya d’abord, sans succès, de fixer la coquille à œuf sur ses organes génitaux à l’aide de cordes. C’est finalement sa rencontre avec Jock Strapper, un ouvrier d’une usine de textiles de Whitby en banlieue de Savannha, qui changea tout et permit d’aboutir le suspensoir. Au lieu de concevoir un tissu épais pour protéger les organes génitaux, créèrent une poche interne dans laquelle insérer une coquille protectrice en plastique. Après plusieurs essais, le suspensoir à coquille protectrice vit le jour, nommé Jock-strap en l’honneur de l’ami qui avait aidé Charles à perfectionner son invention. BIKE, la compagnie de Bennett, aurait vendu plus de 300 millions de suspensoirs à ce jour.

Jock-cup pour suspensoir.
Son usage se multiplia dans d’autres activités sportives et sa production fut relayée par d’autres entrepreneurs proposant des formes de toutes sortes et, surtout, des packagings sensés les rendre plus attractifs. Toutefois, certains sportifs sont restés longtemps dépourvus de cette protection. L’histoire raconte que le jockstrap à coquille fut intégré seulement en 1927 dans l’équipement des joueurs de hockey de l’équipe du Canada. Du reste, la forme, la structure et les matériaux souples ou durs de la coquille ont aussi été améliorés afin qu’elle soit mieux adaptée et plus légère pour les athlètes pratiquant des sports de contacts parfois violents, tels que le football américain, le rugby, le baseball, le hockey sur glace, la boxe, les arts martiaux et le cricket. Cette protection mise à part, il ne faut pas oublier un autre point essentiel : l’absence de tissu sur les fesses améliore l’élimination de la chaleur et évite les frottements, donc les irritations.



Le succès de ce sous-vêtement a initié des idées de diversification en termes de vocation utilitariste. Si Bennett se préoccupait avant tout du sort des cyclistes, un fan de combat ultime devenu entrepreneur, du nom de Jeremiah Raber, a créé ses propres modèles pour les combattants de l’UFC, l'Ultimate Fighting Championship, une organisation américaine d'arts martiaux mixtes qui est actuellement la plus importante ligue mondiale de ce sport de combat. Son égérie est devenue Georges St-Pierre, né le 19 mai 1981 à Saint-Isidore au Canada, considéré comme un des plus grands combattants de l’UFC, un des plus titrés et un des plus médiatisés. Mais ce n’est pas lors des combats que la popularité des jockstraps de l’entrepreneur américain Jeremiah Raber prend un essor démesuré : il invente le premier jockstrap pare-balle, le « Nutshellz » et propose des démonstrations filmées où il encaisse littéralement un coup de fusil entre les deux jambes : https://www.irishmirror.ie/news/weird-news/balls-steel-watch-man-shot-5783684. Bien entendu, les ventes s’affolent immédiatement auprès des instances militaires et l’entreprise engrange des milliers de dollars.

Nutshellz, jockstrap pare-balle de l’entrepreneur américain Jeremiah Raber.
De l’autre côté de la rive, loin de ces mesures protectionnistes des organes génitaux, il y a l’exhibitionnisme du sillon interfessier et des deux fesses qui l’entourent, galbées par les deux bandes élastiques latérales qui les englobent. L’accessoire phare de la Bike Company change de marché et tente de conquérir l’Europe au début du 21ème siècle. Vendu dans les boutiques de fringues branchées aux USA, il ne conquiert que les rayons des sex-shops européens, comme produit phare des magasins de dessous pour messieurs. Peu de gens s’en souviennent, mais il s’aventure même dans les rayons de chaînes de prêt-à-porter : le géant suédois H&M propose un jockstrap au milieu des années 2000 ; c’est un flop car le sous-vêtement ressemble plutôt à une gaine dont la ceinture élastique remonte jusqu’à mi-ventre, l’antithèse du sex-appeal. Et, il convient de le dire et de le reconnaître, il y a cette image bien plus prononcée qu’aux USA que ce sous-vêtement est conçu pour les « pédés »3, alors qu’il est plutôt perçu comme un accessoire commun de l’accoutrement sportif américain, quand bien même il participe à un éveil de la sexualité homosexuelle et bisexuelle parmi les adolescents. Du reste, en Europe, le jockstrap conquit des griffes prestigieuses dont la clientèle sexuelo-virilo-masculine l’accueille avec enthousiasme, surtout pour les fesses laissées à l’air, de Diesel, Calvin Klein, Versace à Dsquared. Les coloris, les motifs, les matériaux, tout est fait pour rendre appréciable de laisser ses fesses à l’air sous son pantalon, son bermuda ou son short. Du confort, de l’aisance, de la respiration et, c’est crucial, du galbe qui attise l’œil. De fait, les magazines s’en emparent pour des shootings des plus érotico-glamours.
Et puis, soyons francs, une fois déshabillé comme Adam Killian, les fesses et la raie des fesses à l’air, tout homosexuel ou bisexuel est charmé, obnubilé ou perverti par une excitation provoquée par la beauté d’un corps taillé comme une statue antique et saisi par une ferveur éveillée par une envie d’emprise tactile et de concupiscence charnelle. Le jockstrap attise les pulsions sexuelles, surtout lorsqu’il est mis en valeur par la croupe rebondie d’un acteur porno gay…


Cette histoire d’une mode à double facette doit se conclure sur l’avenir qui se dessine pour ce jockstrap / suspensoir. Il convient d’observer l’immense merchandising qui est en train de se mettre en place autour du jockstrap pour conquérir la communauté gay, surtout de la part de leurs icônes. Dernière proposition en date : Lady Gaga qui, pour accompagner la sortie de son album Chromatica, a lancé un jockstrap à l’effigie de son nouvel album, rose fluo et marqué du logo et du titre de son nouvel album. Coup marketing ? Démocratisation d’un sous-vêtement largement vilipendé ? Envie de voir une foule fesses nues dans la fosse des salles de concert ? Chacun se fera son idée !

Jockstrap Chromatica vendu en exclusivité avec le nouvel album de Lady Gaga, mai 2020.
Le sillon ou pli interfessier, nommé aussi rainure interfessière ou raie des fesses, qualifie la fente qui sépare les deux fesses en deux demi-lunes qui suivent la courbure du sacrum et du coccyx. Cette description anatomique précisée, il s’agit de voir comment le vestiaire masculin a été constitué pour habiller ce sillon interfessier. Slip, slip kangourou, caleçon, boxer, shorty, string, l’homme bénéficie d’une large gamme de modèles dont la longueur et l’ajustement sont très variables. Il reste un modèle nommé « jockstrap » qui se démarque de ces sous-vêtements par l’ample faille qu’il laisse libre de tout tissu, justement au niveau des fesses. Le jockstrap que l’on appelle également jock ou « suspensoir » est un sous-vêtement pour homme comprenant une poche pour maintenir correctement les organes génitaux, d’une large ceinture et de 2 élastiques latéraux qui laissent les fesses entièrement à découvert. Si, aujourd’hui, c’est sa fonction de sex-appeal qui s’est ancrée dans l’imaginaire collectif, son origine et son utilité sont à chercher dans un autre domaine. Revenons sur l’histoire de la mode de ce jockstrap qui laisse libre de tout tissu les deux fesses et la faille qui les sépare.

« Jockstrap » ou « suspensoir » (face, côté, arrière)
Les historiens font remonter l’apparition du jockstrap à 1874 et les premières expérimentations d’un jeune homme du nom de Charles F. Bennett, 18 ans, receveur de balle au baseball pour les Red Barons de Savannha en Georgie. Il aurait raté la réception d’un lancer qui lui serait arrivé directement dans les parties génitales. La glace appliquée par son coach ne changeant rien à la douleur endurée, cette expérience lui aurait donné l’envie et l’idée de créer une protection pour les organes génitaux et le scrotum, sans pour autant contraindre l’arrière du bassin, les fesses, afin de conserver à la fois un mouvement de flexibilité pour la position accroupie de receveur et une souplesse d’action pour la course qui s’ensuit ; cette large fente à l’arrière du sous-vêtement était encore plus importante pour le bien-être corporel puisqu’elle permettait d’éviter tout frottement avec la matière épaisse et rêche du sous-vêtement, laissant un contact direct avec la matière beaucoup plus fine et délicate du pantalon et permettant au pores de la peau de mieux respirer, donc de minimiser toute irritation cutanée.

Modèle associant le Jockstrap au suspensoir inventé par Charles F. Bennett, déposé le 29 mars 1897 et breveté le 30 novembre 1897 par the United States Patent and Trademark Office.
Mais, comme toujours en histoire de la mode, tout n’est pas si simple ! Cette fente vestimentaire qui laisse apparaître le pli interfessier tout en couvrant le scrotum, à savoir les testicules et le pénis, est bien plus ancienne. Elle apparaît au 15ème siècle, au moment où l’homme abandonne la tunique portée depuis près de 3000 ans et choisit d’adopter un pourpoint court cintré à la taille auquel sont attachées deux chausses, sortes de longues chaussettes, qui couvrent chacune des jambes mais qui ne sont pas cousues au niveau du bassin et, en particulier, de l’entrejambe. Cela est parfaitement perceptible sur plusieurs images.



Le détail de la fresque de Piero della Francesca est un exemple de cette silhouette impudique qui, au regard du résultat, mérite incontestablement d’être qualifiée d’exhibitionniste. Cela explique le sermon prononcé en 1429 par San Bernardino de Sienne – pionnier dans la censure morale en matière d’habillement – dans lequel il réprimande les parents qui habillent leurs jeunes garçons de cette nouvelle silhouette qui montre beaucoup de chair aux sodomites1 . Mais la résonance de ce sermon est restée timide puisqu’il s’avère nécessaire de proclamer des ordonnances, notamment à Nuremberg et à Strasbourg en 1480, qui préconisent de faire en sorte que « les parties privées ne soient plus visibles ni par devant ni par derrière »2. La bipartition des chausses laissant l’entrejambe simplement couvert par les plis amalgamés de la longue chemise portée en dessous, il restait à trouver un dispositif de fermeture réunissant les deux chausses. C’est à la fin du 15ème siècle que le haut-de-chausses se généralise en tant que vêtement unitaire, avec un rabat triangulaire réunissant les chausses au niveau du plancher pelvien et maintenu au niveau du pubis.

Jockstrap, publicité pour la société Bike de Charles F. Bennett, 1941.
Cette ouverture sur les fesses réapparaît à la fin du 19ème siècle, à une époque charnière pour l’essor de nombreux sports à risque dont la pratique intensive pouvait provoquer des séquelles douloureuses sur les organes génitaux masculins. En réalité, Charles F. Bennett possédait une marque de vêtements et d’équipements de sports baptisés « Bike » qui, comme le nom l’indique, était surtout destinée aux cyclistes. Effectivement, à partir des années 1890, les premiers utilisateurs d’un suspensoir avec un tissu rembourré au niveau des organes génitaux et du scrotum sont les « bike jockeys », à savoir les livreurs et les messagers dont l’activité se faisait principalement à vélo.
Le premier modèle de suspensoir se trouvait être strictement un tissu avec une ceinture et deux bandes élastiques latérales. Bennett essaya divers types de matériaux mais ils s’avéraient toujours trop épais, trop lourds, donc inconfortables pour les sportifs. La légende raconte qu’un jour il vit sa mère faire cuire des œufs à la coque avec un petit appareil en plastique. Elle mettait les œufs dans de petites coquilles en plastique pour les faire bouillir. L’idée était née ! Il lui fallut de nombreux essais infructueux pour établir un prototype ; il essaya d’abord, sans succès, de fixer la coquille à œuf sur ses organes génitaux à l’aide de cordes. C’est finalement sa rencontre avec Jock Strapper, un ouvrier d’une usine de textiles de Whitby en banlieue de Savannha, qui changea tout et permit d’aboutir le suspensoir. Au lieu de concevoir un tissu épais pour protéger les organes génitaux, créèrent une poche interne dans laquelle insérer une coquille protectrice en plastique. Après plusieurs essais, le suspensoir à coquille protectrice vit le jour, nommé Jock-strap en l’honneur de l’ami qui avait aidé Charles à perfectionner son invention. BIKE, la compagnie de Bennett, aurait vendu plus de 300 millions de suspensoirs à ce jour.

Jock-cup pour suspensoir.
Son usage se multiplia dans d’autres activités sportives et sa production fut relayée par d’autres entrepreneurs proposant des formes de toutes sortes et, surtout, des packagings sensés les rendre plus attractifs. Toutefois, certains sportifs sont restés longtemps dépourvus de cette protection. L’histoire raconte que le jockstrap à coquille fut intégré seulement en 1927 dans l’équipement des joueurs de hockey de l’équipe du Canada. Du reste, la forme, la structure et les matériaux souples ou durs de la coquille ont aussi été améliorés afin qu’elle soit mieux adaptée et plus légère pour les athlètes pratiquant des sports de contacts parfois violents, tels que le football américain, le rugby, le baseball, le hockey sur glace, la boxe, les arts martiaux et le cricket. Cette protection mise à part, il ne faut pas oublier un autre point essentiel : l’absence de tissu sur les fesses améliore l’élimination de la chaleur et évite les frottements, donc les irritations.



Le succès de ce sous-vêtement a initié des idées de diversification en termes de vocation utilitariste. Si Bennett se préoccupait avant tout du sort des cyclistes, un fan de combat ultime devenu entrepreneur, du nom de Jeremiah Raber, a créé ses propres modèles pour les combattants de l’UFC, l'Ultimate Fighting Championship, une organisation américaine d'arts martiaux mixtes qui est actuellement la plus importante ligue mondiale de ce sport de combat. Son égérie est devenue Georges St-Pierre, né le 19 mai 1981 à Saint-Isidore au Canada, considéré comme un des plus grands combattants de l’UFC, un des plus titrés et un des plus médiatisés. Mais ce n’est pas lors des combats que la popularité des jockstraps de l’entrepreneur américain Jeremiah Raber prend un essor démesuré : il invente le premier jockstrap pare-balle, le « Nutshellz » et propose des démonstrations filmées où il encaisse littéralement un coup de fusil entre les deux jambes : https://www.irishmirror.ie/news/weird-news/balls-steel-watch-man-shot-5783684. Bien entendu, les ventes s’affolent immédiatement auprès des instances militaires et l’entreprise engrange des milliers de dollars.

Nutshellz, jockstrap pare-balle de l’entrepreneur américain Jeremiah Raber.
De l’autre côté de la rive, loin de ces mesures protectionnistes des organes génitaux, il y a l’exhibitionnisme du sillon interfessier et des deux fesses qui l’entourent, galbées par les deux bandes élastiques latérales qui les englobent. L’accessoire phare de la Bike Company change de marché et tente de conquérir l’Europe au début du 21ème siècle. Vendu dans les boutiques de fringues branchées aux USA, il ne conquiert que les rayons des sex-shops européens, comme produit phare des magasins de dessous pour messieurs. Peu de gens s’en souviennent, mais il s’aventure même dans les rayons de chaînes de prêt-à-porter : le géant suédois H&M propose un jockstrap au milieu des années 2000 ; c’est un flop car le sous-vêtement ressemble plutôt à une gaine dont la ceinture élastique remonte jusqu’à mi-ventre, l’antithèse du sex-appeal. Et, il convient de le dire et de le reconnaître, il y a cette image bien plus prononcée qu’aux USA que ce sous-vêtement est conçu pour les « pédés »3, alors qu’il est plutôt perçu comme un accessoire commun de l’accoutrement sportif américain, quand bien même il participe à un éveil de la sexualité homosexuelle et bisexuelle parmi les adolescents. Du reste, en Europe, le jockstrap conquit des griffes prestigieuses dont la clientèle sexuelo-virilo-masculine l’accueille avec enthousiasme, surtout pour les fesses laissées à l’air, de Diesel, Calvin Klein, Versace à Dsquared. Les coloris, les motifs, les matériaux, tout est fait pour rendre appréciable de laisser ses fesses à l’air sous son pantalon, son bermuda ou son short. Du confort, de l’aisance, de la respiration et, c’est crucial, du galbe qui attise l’œil. De fait, les magazines s’en emparent pour des shootings des plus érotico-glamours.
Et puis, soyons francs, une fois déshabillé comme Adam Killian, les fesses et la raie des fesses à l’air, tout homosexuel ou bisexuel est charmé, obnubilé ou perverti par une excitation provoquée par la beauté d’un corps taillé comme une statue antique et saisi par une ferveur éveillée par une envie d’emprise tactile et de concupiscence charnelle. Le jockstrap attise les pulsions sexuelles, surtout lorsqu’il est mis en valeur par la croupe rebondie d’un acteur porno gay…


Cette histoire d’une mode à double facette doit se conclure sur l’avenir qui se dessine pour ce jockstrap / suspensoir. Il convient d’observer l’immense merchandising qui est en train de se mettre en place autour du jockstrap pour conquérir la communauté gay, surtout de la part de leurs icônes. Dernière proposition en date : Lady Gaga qui, pour accompagner la sortie de son album Chromatica, a lancé un jockstrap à l’effigie de son nouvel album, rose fluo et marqué du logo et du titre de son nouvel album. Coup marketing ? Démocratisation d’un sous-vêtement largement vilipendé ? Envie de voir une foule fesses nues dans la fosse des salles de concert ? Chacun se fera son idée !

Jockstrap Chromatica vendu en exclusivité avec le nouvel album de Lady Gaga, mai 2020.
- Cité dans SIMONS, 2011, p. 99.
- Cité dans TRUMAN, 1952, p. 39 ; répété notamment dans LAVER, 1974, p. 68 ; VICARY, 1989, p. 8 et LÜTTENBERG, 2005, p. 60.
- « Le jockstrap, facile pour aller chier, idéal pour les PD [...] et j'irai même plus loin, au bûcher ! Il faut reprendre les vieilles méthodes et punir ces malades », dans Flannan Obé, président de SOS Homophobie (dir.), Rapport 2006 sur l’homophobie, chapitre 5 : Déluge de propos homophobes et sentiment d’impunité, Paris, KTM éditions, p. 96.