Tu es la seule à l’avoir vu, mais tu n’as rien pu faire.
Tu es un bloc de pierre à présent.
En ce temps-là, tu as un corps bien à toi.
Tu avais trop parlé, on t’a fait taire. Tu erres, avec un corps sans langage.
Tu portes l’indice d’une faute qui va te lier à quelqu’un. Tu vas, peut-être, te débarrasser de ta peine.
Penché, au bord de l’eau, ce qu’il voit, ce que tu vois.
Tu t’appuies sur ses mots à lui, tu essaies.
Tu répètes. Tu dis viens. Tu regardes, il est accroupi, et penché.
L’eau est claire, l’amour immédiat.
Il parle à l’autre en face dans le miroitement. Ça lumine en lui-même. Il nait, du rapport entre lui et l’autre en face. Ils font bloc.
Il ne bouge plus. Il fait l’image.
On dit qu’il est de ceux qui sont amoureux.
Ce qu’il voit, qu’il aime. Ce que tu vois de lui, qu’il ne sait pas.
Tu es amoureuse, et sans image.
L’eau bouge. Que dit l’eau.
L’image est humide, c’est ce qu’il faut comprendre. Il faut bien mouiller le pinceau. Il s’agit que la beauté se prononce dans une âme.
Si on voit des beautés corporelles, il ne faut pas courir à elles, mais savoir qu’elles sont des images.
Pour savoir ce que c’est qu’une image, il faut fermer les yeux et échanger la manière de voir.
La confusion est possible en soi.
Tu assistes à la scène, au drame de la beauté quand elle se trouve dans un corps. Tu es au bord d’y participer mais tu n’as pas voix au chapitre.
Tu n’existes pas pour lui.
Pour l’instant personne ne doit parler. Le langage ne vient pas troubler l’image.
Ce que tu vois est tout ce qui ne peut se dire.
L’endroit exact où l’image et le son ne se rencontrent pas.
On a : un bloc d’image et un bloc de son. Les deux séparés, autonomes.
L’image dans l’image. Le son dans le son. Chacun de son côté, à sa rencontre.
Tu n’avais jamais pensé que la beauté, à ce point, pourrait vous séparer, et vous séparant, donnerait la raison de ce que vous êtes, chacun : le son et l’image.
Tandis qu’il reste, courbé sur lui-même. Il se toise, à bonne distance encore. Tu n’avais pas remarqué combien cette attitude te rappelait celle qui précède un baiser quand un corps surplombe un autre, du dessus le regarde, avant que le visage ne s’enfonce dans l’autre visage.
Il ne sent pas son corps peser, pas encore la douleur descendre dans les poignets.
Le vrai et le faux sont symétriques exactement, mais non égaux.
Il brille et l’autre brille aussi, en face. En face et en-dessous. Est-ce descendre. Est-ce monter en l’âme. Dans quel sens aller pour la rejoindre. L’encerclement des bras le retient sur le bord. Il ne tombe pas. Il est l’auteur d’un cercle parfait, d’un pacte qu’il ne peut pas rompre.
Il se serait perdu. Il serait venu boire. Il se serait agenouillé. Il aurait mis les mains en vasque. Il aurait remonté ses culottes, et plié les genoux. Il se serait penché et ses cheveux seraient tombés devant ses yeux. Ce serait allé vite. Il aurait eu soif. Il serait arrivé là poussé par l’immanence du bois.
Avec le doigt, tu tapotes sur les petits points de lumière. Tu touches le rivage du bout des doigts comme on essuie une goutte.
Soudain l’eau se trouble, la posture se rompt.
Cela a lieu pendant ce temps que le pinceau va et vient allant et reculant par touches d’eau et de pigments. Tu te demandes s’il faut commencer par le début, ou par la fin. Dans quel sens aller pour raconter cette histoire, pour commencer le tableau. On te dit de partir du milieu qui est aussi le bord, que c’est une histoire qui tourne, que tu peux la prendre n’importe quand, par les deux bouts, des deux côtés, tu reviendras toujours au même point.
C’est une histoire qui tourne avec des doubles qui s’aiment sans toi. Ton privilège est d’être le seul témoin, le seul rapporteur de la scène – et de couper là où tu veux.
Tu constates qu’il a l’air d’avoir été … légèrement poussé dans le cadre du tableau. Suppléante invisible des deux mains en appui sur le bord, une autre, souveraine, absente, pèse sur la tête et la nuque de l’enfant, qui s’incline, poussé, engourdi maintenant dans la recherche de cette ressemblance.
Y-a-t-il quelqu’un près de moi ?
Tu dis : le peintre. Et puis : toujours quelqu’un d’autre encore, dans la main du peintre. Ou bien : simplement, si tu arrêtes la fable avant qu’elle ne retourne au début, avant que la roue tourne et que tu passes encore ton tour, maladroite médusée immobile : le peintre lui-même cet enfant poussé dans l’image par quelque main
Tu es la seule à l’avoir vu, mais tu n’as rien pu faire.
Tu es un bloc de pierre à présent.
En ce temps-là, tu as un corps bien à toi.
Tu avais trop parlé, on t’a fait taire. Tu erres, avec un corps sans langage.
Tu portes l’indice d’une faute qui va te lier à quelqu’un. Tu vas, peut-être, te débarrasser de ta peine.
Penché, au bord de l’eau, ce qu’il voit, ce que tu vois.
Tu t’appuies sur ses mots à lui, tu essaies.
Tu répètes. Tu dis viens. Tu regardes, il est accroupi, et penché.
L’eau est claire, l’amour immédiat.
Il parle à l’autre en face dans le miroitement. Ça lumine en lui-même. Il nait, du rapport entre lui et l’autre en face. Ils font bloc.
Il ne bouge plus. Il fait l’image.
On dit qu’il est de ceux qui sont amoureux.
Ce qu’il voit, qu’il aime. Ce que tu vois de lui, qu’il ne sait pas.
Tu es amoureuse, et sans image.
L’eau bouge. Que dit l’eau.
L’image est humide, c’est ce qu’il faut comprendre. Il faut bien mouiller le pinceau. Il s’agit que la beauté se prononce dans une âme.
Si on voit des beautés corporelles, il ne faut pas courir à elles, mais savoir qu’elles sont des images.
Pour savoir ce que c’est qu’une image, il faut fermer les yeux et échanger la manière de voir.
La confusion est possible en soi.
Tu assistes à la scène, au drame de la beauté quand elle se trouve dans un corps. Tu es au bord d’y participer mais tu n’as pas voix au chapitre.
Tu n’existes pas pour lui.
Pour l’instant personne ne doit parler. Le langage ne vient pas troubler l’image.
Ce que tu vois est tout ce qui ne peut se dire.
L’endroit exact où l’image et le son ne se rencontrent pas.
On a : un bloc d’image et un bloc de son. Les deux séparés, autonomes.
L’image dans l’image. Le son dans le son. Chacun de son côté, à sa rencontre.
Tu n’avais jamais pensé que la beauté, à ce point, pourrait vous séparer, et vous séparant, donnerait la raison de ce que vous êtes, chacun : le son et l’image.
Tandis qu’il reste, courbé sur lui-même. Il se toise, à bonne distance encore. Tu n’avais pas remarqué combien cette attitude te rappelait celle qui précède un baiser quand un corps surplombe un autre, du dessus le regarde, avant que le visage ne s’enfonce dans l’autre visage.
Il ne sent pas son corps peser, pas encore la douleur descendre dans les poignets.
Le vrai et le faux sont symétriques exactement, mais non égaux.
Il brille et l’autre brille aussi, en face. En face et en-dessous. Est-ce descendre. Est-ce monter en l’âme. Dans quel sens aller pour la rejoindre. L’encerclement des bras le retient sur le bord. Il ne tombe pas. Il est l’auteur d’un cercle parfait, d’un pacte qu’il ne peut pas rompre.
Il se serait perdu. Il serait venu boire. Il se serait agenouillé. Il aurait mis les mains en vasque. Il aurait remonté ses culottes, et plié les genoux. Il se serait penché et ses cheveux seraient tombés devant ses yeux. Ce serait allé vite. Il aurait eu soif. Il serait arrivé là poussé par l’immanence du bois.
Avec le doigt, tu tapotes sur les petits points de lumière. Tu touches le rivage du bout des doigts comme on essuie une goutte.
Soudain l’eau se trouble, la posture se rompt.
Cela a lieu pendant ce temps que le pinceau va et vient allant et reculant par touches d’eau et de pigments. Tu te demandes s’il faut commencer par le début, ou par la fin. Dans quel sens aller pour raconter cette histoire, pour commencer le tableau. On te dit de partir du milieu qui est aussi le bord, que c’est une histoire qui tourne, que tu peux la prendre n’importe quand, par les deux bouts, des deux côtés, tu reviendras toujours au même point.
C’est une histoire qui tourne avec des doubles qui s’aiment sans toi. Ton privilège est d’être le seul témoin, le seul rapporteur de la scène – et de couper là où tu veux.
Tu constates qu’il a l’air d’avoir été … légèrement poussé dans le cadre du tableau. Suppléante invisible des deux mains en appui sur le bord, une autre, souveraine, absente, pèse sur la tête et la nuque de l’enfant, qui s’incline, poussé, engourdi maintenant dans la recherche de cette ressemblance.
Y-a-t-il quelqu’un près de moi ?
Tu dis : le peintre. Et puis : toujours quelqu’un d’autre encore, dans la main du peintre. Ou bien : simplement, si tu arrêtes la fable avant qu’elle ne retourne au début, avant que la roue tourne et que tu passes encore ton tour, maladroite médusée immobile : le peintre lui-même cet enfant poussé dans l’image par quelque main